En arrivant à Figuera da Foz © CdR, 2003.


C'est Alex qui l'a choisie ! © CdR, 2003.


À Figuera, on est bien © CdR, 2003.


Il fait beau, hein ? © CdR, 2003.


Des jolies couleurs du soir © CdR, 2003.


Échauffements avant le footing © CdR, 2003.


Ah la vache ! J'en chie ! © CdR, 2003.


Construction touristique sur la plage de Figuera © CdR, 2003.


Quand il pleut dehors, le linge sèche dedans © CdR, 2003.

 

 

 

 

 

• Les journaux de bord de Rémy et d'Alex du mois de septembre et plus de photos...

3h20 du matin. Grosse dépression au-dessus de nos têtes, grosse pression à bord. Je viens d'avoir une altercation avec Rémy.

On s'est échangé des regards d'une dureté que je n'aurais jamais cru atteindre avec lui. L'affaire a suivi son petit bonhomme de chemin, basée sur des comportements qui se diluent dans les relations terrestres, mais sévissent comme une nappe de pétrole, en mer. Dur et cruel, pour résumer, agressif et tendu, à la limite de la bagarre presque, mais nous ne sommes pas bagarreurs. Je lui suis gré de m'avoir sorti mes quatre vérités sur un coportement que j'ai développé depuis quelque temps face à un manque de reconnaissance, je crois, ou de réussite, mais on n'osait pas ou on n'a pas su me le dire avant, ou ne l'ai-je pas entendu. Pourquoi faut-il des clashs parfois. rémy pense qu'on peut faire sans, moi pas. Il était temps de mettre ça au clair car je commençais à m'enfoncer dans un terrain boueux.

J'ai toujours encouragé ce genre de mise au point que peu sont capables de faire, même s'il m'est aussi dur d'admettre mes tords qu'à n'importe qui. Il me semble que beaucoup trop de gens passent à côté de cette expérience aussi dure qu'enrichissante. Je l'attendais depuis longtemps, l'ai presque provoquée et je m'en réjouis après coup. Merci Rémy. À moi de corriger le tir maintenant. Je vous conseille d'encourager vos amis dans ce sens, si vous en avez, sinon trouvez-en ou testez les votres, il n'y a rien de mieux qu'un bon voyage dans des conditions précaires pour ça. Juste avant notre départ, c'est Fred qui y a eu droit, comme moi ce soir, coincé entre un coin de table et un coin de mur d'un restaurant. Je pense qu'il s'y attendait encore moins. Il m'est arrivé de le faire à d'autres, amis ou pas, en général, ça se passe mal, et c'est normal. Il faut du temps pour admettre, cogiter, se rendre compte qu'on le savait déjà, mais il fallait que quelqu'un le dise, il faut de bons amis pour ça. Bizarement, les inconnus ont l'air de mieux le prendre que les amis. Ma mère me disait qu'on ne connaît bien une personne que lorsqu'on s'est engueulé avec (je peux dire que je connais bien Rémy désormais). Les femmes sont encore plus sensées quand elles sont mères. Je salue la mienne au passage. Bon, pour les détails, j'y reviendrai avec la chronologie du voyage. En attendant je replonge dans "La nuit des temps" de Barjavel. Bonne nuit, Alex.

 

Jeudi 2 octobre 2003, 13h20 heure locale, port de Figuera da Foz, Portugal.

Le temps se gâte et se calme à la fois, entre deux éclaircies, ça souffle fort avec de grosses gouttes de pluie, 37 nouds nous dit notre voisin, d'après son anémomètre situé au sommet du mât, ça fait environ 70 km/h. et on aura pire. Cette escale est judicieuse.

Nous partions encore une fois pour Lisbonne, et, encore une fois, la météo nous a dérouté. Ce coup-ci, les prévisions de France Inter ont suffi à nous convaincre, assez du gros temps, assez de l'humidité, assez du mal de mer. C'est en arrivant sur Figuera da Foz que notre brouille s'est matérialisée. Rémy me faisait des reproches que je n'acceptais pas et, du coup, exagérait sur des critiques qui, pour moi, n'avaient pas lieu d'être ou pas suffisamment pour se bouder.

Figuera da Foz, station balnéaire évidemment surpeuplée l'été, mais tranquille en cette saison. enfin une douche, mais il faudra d'abord passer par la capitainerie, le poste de police et les douanes, tous aussi sympathiques que méthodiques. En rentrant de la mise au propre, le soleil se couche, on prend un apéro-dîner léger dans l'espoir d'aller explorer la ville avant son extinction. C'est alors que nos voisins français sortent le bout du nez. Ils sont arrivés en même temps que nous. Comme souvent entre marins, plus qu'entre terrestres, c'est la météorologie qui lance la conversation. ce couple reçoit des cartes météo via la radio à ondes courtes (BLU) par des sons informatiques que l'ordinateur interprète en images, mais la réception est actuellement mauvaise. Après avoir décliné notre invitation à bord d'Emma (il est vrai qu'on se trouve vite serré à bord), c'est à leur bord qu'on se retrouve tous pour un apéro-météo, car c'est l'heure de recevoir une image, floue mais lisible. On ne rentrera plus que pour aller se coucher.

Le lendemain, nous partons, Rémy et moi, pour un photo-footing de réconciliation. Une heure de course, pour nous c'est long, surtout qu'il fait très lourd, nos poumons ont du mal à aspirer et assimiler cet air gorgé d'eau. Les quelques pots d'échappement que l'on croise nous asphyxient comme jamais, surtout après une côte à la Ménilmontant.

Cette grande plage fragmentée par des passerelles en bois menant jusqu'au bord de l'eau me plait. Juste sous la promenade fleurissent des terrains de sports estivaux : basket-ball, volley, rampes de skate, etc. On y trouve même une petite mare à canards, cerclée de verdure. On l'explore par un réseau de passerelles plus dense qu'ailleurs, des plate-formes attendent les beaux jours des terrasses animées. Le sable est ratissé partout, cela lui donne un air de jardin japonais. Comme partout, la sur-foule de la chaude saison doit voiler de sa densité et son brouhaha ces quelques charmes d'hors saison. Au retour d'un profond cul-de-sac, nous tombons sur Fred en vadrouille, enfin un bon prétexte pour s'arrêter un instant et souffler un peu, souffler encore... Il pleut, zut ! On repart, laissant fred à ces gouttes.

Arrivés au bateau mouillé de sueur et de pluie, juste à temps pour le bulletin météo. douche. Je retourne à Barjavel, 400 pages en deux jours, ça faisait longtemps que ça ne m'était pas arrivé, il fallait que ce soit un bon livre et un mauvais temps. Fred reste au bateau, nous allons au cyber prendre des nouvelles de nos amis et amies et de leurs embrisons euh, pardon, embryons. Il nous rejoint quand nous rentrons, averse. Au soir, resto, le seul ouvert en chemin, avec un toit de tuies à l'intérieur, des jambons et autres spécialités locales pendouillent sous la charpente décorative, une bouteille d'un bon décalitre de bière attend on ne sait quelle occasion devant une vitrine de cigares alléchants. Viande pour moi, poissons pour eux, vin rouge (tinto), et pour dessert, en lent crescendo au parfum de café, une engueulade dont Fred n'a été que témoin. Elle a continué dans la rue, sur le chemin du port et s'est terminée comme elle est arrivée, en doux décrescendo, pour finir par un digeo chaleureux en bout de ponton, conclusion-réconciliation. Averse, orage, lecture, etc. Bonne nuit, grasse mâtinée.

Lecture au matin, Rémy rentre dans l'ordi les interminables pages de son cahier. Il s'impressionne lui-même de son débit, c'est une autre affaire quand on doit retranscrire tout dans l'ordi, un temps fou. Je ne le lis pas pour l'instant de peur que nos styles se rapprochent, le risque est la répétition, s'cusez du peu !

Marcher, manger, lecture, averse, rentrer le linge, l'étendre à l'intérieur, soirée dans une forêt de loques suspendues créant des micro-secteurs d'une intimité nouvelle, ça sent pas trop le propre, bizzarrre. dans un élan de courage, je me prépare pour un footing nocturne, averse, mes chaussures ne quitterons pas le bord, ordi-lecture-dodo.

Leurs fruits sont bons, leurs tomates ne ressemblent pas à nos ballons de plastique gonflés à l'eau, bouchés par un capuchon vert qui, lui seul, a gardé l'odeur du légume dont il a été inspiré. Ce matin, ma tenue m'attendait au bord de la couchette, je l'enfile et sort, échauffements, averse violente. Le temps de rejoindre Emma (en croisant Rémy au passage) et j'arrive plus trempé que si l'on m'avait poussé à l'eau. Ordi, plus de courant, ça a dû gronder cette nuit. D'autres voiliers sont arrivés : un vieux gréement modernisé allemand et deux pavillons anglais. Éclaircie, on sort le linge, déjeuner, le linge est sec, sieste, Fred lit ou dort à l'avant, Rémy s'est roulé dans son duvet après quelques ronflements devant son livre, moi, j'écris ces mots en entrant nos musiques dans l'ordi, voilà. Il se peut que l'on parte demain. Fred a vu un chalutier s'échouer sur cette plage à plaisirs, et la mer le détruire à vue d'œil. Il vaut mieux pour nous être patients. Il est 17 heures, heure locale. 18 heures, heure française.

22h30 heure locale. Bon, ce soir, on se charge. Les escales de mauvais temps à rallonge nuisent à la santé du marin !

2h20 du lendemain matin.
C'est chouette les SMS.
C'est long de tout retranscrire dans l'ordi.
C'est agréable la pluie pour dormir.

 

Vendredi 3 octobre 2003, 12h45 heure locale.

Désormais, nous garderons pour référence l'heure portugaise à laquelle sont réglées toutes les horloges du bord. On a quitté Figuera da Foz vers 12 heures, juste après les Français et un bateau anglais. Une fenêtre météo s'offre à nous, peu de vent mais venant de la bonne direction : Nord-Nord-Ouest virant Nord-Nord-Est. Seul inconvénient mineur : des averses, pour l'instant, des bouffées de nuages voilent de temps à autre un soleil dégagé, à quelques miles derrière nous passe une colonie de pluie.

 

Lundi 6 octobre 2003, 2h30 du mat, port de Lisbonne.

Enfin Lisbonne, les vents ont été généreux avec nous. Spi, voiles en ciseaux. On a avancé à 4, puis 5, puis 6 et 7 nœuds à l'arrivée, pas d'averse. Nous sommes arrivés ce samedi 4 vers 12h30, avant nos prévisions les plus optimistes. Toujours rien au bout de nos lignes. Si ! Nous pêchons de nœuds ! Canal 16 : "Folalier, Folalier, pour Emma". Rien. Plus tard : "Folalier, Folalier, pour Emma". "Emma, Emma, pour Folalier, on passe canal 67, 6-7". "Reçu, canal 67, bla blabla". oN met le cap sur le port de Caiscas pour les rejoindre. Je suis à la barre et finis quelques vers d'une chanson de tiers noircissant mon journal.

Ça nous a fait plaisir de tous se retrouver. Les deux sœurs de William étaient là, on a apéro-dîné, elles ont débarqué pour prendre le train, l'avion, la France. Pour nous, la sieste. Fred remonte le vélo et s'en va faire un tour. Douches, internet, dîner et dodo. Caisca est très chic.

Ce jour, ballade dans Lisbonne, 45 minutes de train nous en séparent, le long de la côte, entre villes cossues et zones à blocs. Chouette centre ville, je précise, car on nous a dit bien du mal sur le reste. Les sols sont bariolés, les bâtiments colorés de tons pastels, le soleil cogne sur la tête, une espèce de tour métallique fait office de tour Eiffel. Ça monte, ça descend, les tramways filent, point trop de voitures (c'est dimanche), ruines restaurées, verdure un peu partout, un jardin immense semble rivaliser en grandeur avec l'urbanisme. Fait exceptionnel : il a neigé sur Lisbonne ! Attention, j'ai des photos pour preuve.

On ne trouve pas de restau. un autre nous trouve : calamars, morue, vino tinto. Re-ballade, vers le haut, vers le bas, dégustation d'une liqueur de griotte dans une micro boutique qui ne vend QUE ça, et on attaque la grande ascension vers le chateau fort qui domine la ville, ruelles exigües, des marches, des marches, des marches. On arrive pour le soleil couchant. un couple de paons peu farouches, un foot avec un caillou, des photos, et hop, on redescend. Train, ponton, bateau, on discute météo avec Steven. Emma et Folalaier se sont liés d'amitié. On essaie donc de s'organiser pour partir ensemble, à voir. Il est 3h20, mes comparses dorment, je traîne pour surveiller l'ordi qui travaille. Bon, plus rien à dire, écrire, pour l'instant. À la prochaine escale alors.

Vous allez me manquer, bonne nuit, faites de beaux rêves. Et souvenez-vous-en. Un truc pour ça, c'est de les raconter dès le réveil, au petit déjeuné, en arrivant au travail, ou les enregistrer en se loquant, en se levant. Et puis, réalisez-les. Alex.

 

 
   
© Carnets de route - 2001. Valérie VdP, le 17/09/2003. Tous droits réservés.